Nouvelle affaire d’agressions sexuelles dans le rap français

La co-fondatrice d’un des plus gros médias Twitter dédié au rap s’est exprimée dans un long message. Son agresseur avait officié sur l’adaptation française du programme de Netflix « Rythm and Flow ».

C’est sur Twitter qu’Abir Naji, co-fondatrice du média Twitter @wrld_mag a choisi de partager son témoignage. Dans un long message elle dénonce plusieurs agressions sexuelles qu’elle explique avoir subi il y a maintenant deux ans. Son agresseur : un homme connu dans le milieu du rap et officiant sous le pseudonyme Hype Hagrah. Ancien rappeur et désormais insider du rap français, il a été chroniqueur sur le média de Booba OKLM. Plus récemment il officiait pour le label AWA (Zola, Doria, Luv Resval…). Il a également été invité par Mehdi Maïzi dans un épisode de Rap Jeu avec Redbull.

Deux ans de silence

Dans des notes partagées sur Twitter la jeune femme décrit plusieurs tentatives d’attouchements alors que Hype Hagrah l’avait enjoint à venir signer un contrat pour participer à l’adaptation française de « Rythm and Flow », programme de Netflix dédié au rap et qui compte parmi ses jurys Niska, rappeur soupçonné de violences conjugales sur Aya Nakamura. Dans son long témoignage elle explique également les diverses méthodes de persuasion mis en place par celui qu’elle décrit comme « marié et âgé ». « Alors t’es contente je t’ai donné un taff maintenant à toi de me donner autre chose », s’entend dire la jeune femme qui avait déjà essuyé plusieurs tentatives d’attouchements de la part du même individu. Depuis la publication de ces accusations, de nombreuses personnalités du rap ont réagi et ont apporté leur soutien à Abir Naji. Le label AWA a rapidement annoncé suspendre sa collaboration avec Hype Hagrah dans un message posté sur Twitter.

Joint par nos soins, Abir Naji nous explique qu’elle envisage sérieusement de porter plainte. « Je vais le faire sans aucun doute, c’est en cours puisque je n’ai pas envie que mon témoigne se révèle comme de la diffamation », nous écrit-elle. Elle nous indique également que les équipes de Netflix ont rapidement réagi lorsqu’elle a fait remonté les comportements de son agresseur. « Ils ont été les premiers à être au courant puisqu’ils voyaient que j’étais de moins en moins motivée à travailler avec eux. Je leur en ai fait part et ils m’ont beaucoup accompagné vers des démarches de bienveillance. Après leur avoir envoyé plusieurs preuves, ils ont tout de suite établi une convocation et ont directement viré Hype, ça été la première étape », nous confie t-elle. Une dénonciation qui lui a valu d’être contactée directement par son agresseur par la suite.

Un milieu du rap dans le déni

« J’ai reçu des appels de Hype dès cette première étape, vers octobre il me semble. Beaucoup d’appels en anonyme, j’étais effrayée puisqu’il savait où j’habitais et j’habitais surtout seule. Je faisais souvent des cauchemars où on me violait, m’agressait, j’avais du mal à passer une bonne nuit. », poursuit-elle tout en nous indiquant avoir été contactée depuis la mise en ligne de son témoignage par d’autres victimes. « Beaucoup de personnes m’ont raconté leur histoire avec le même agresseur, Hype. Je veux que cela cesse, qu’il arrête de faire du mal, mentalement comme physiquement à des jeunes femmes qui ne veulent que briller dans le monde de la musique »

Comme beaucoup de femmes dans le milieu professionnel, Abir avoue avoir eu peur pour son travail. « Je suis co fondatrice du média @wrld_mag donc j’avais surtout peur de perdre l’identité de mon média. Surtout lorsqu’on sait que mon agresseur était connu de plusieurs personnalités rap, ça été l’une des raisons pour laquelle j’ai pris du temps à parler. Je m’étais déjà perdue moi-même, j’avais peur de perdre mon média. Toute mon équipe a été bienveillante durant ces deux ans rempli de tristesse. On prône énormément la place de la femme, de la bienveillance. On refuse qu’une personne s’attaque à nous alors, dès qu’ils ont su ce qu’il m’était arrivé, on a tous ensemble arrêté de collaborer avec des gens qui étaient susceptible de soutenir mon agresseur ».

Elle nous explique également avoir reçu de nombreux messages durant ces deux années de la part d’acteurs de l’industrie du rap, l’invitant pour beaucoup à minimiser ses agressions. « Hype c’est un gentil il pensait juste que tu l’aimais bien, il ne voulait pas te faire du mal » « Abir tu es belle t’es charmante, peut-être qu’il a cédé à ton charme, faut pas lui en vouloir ».

Contactés par nos soins, ni le label AWA, ni Hype Hagrah n’ont pour l’instant donné suite à nos demandes d’interview.

Toujours pas de #MeToo dans le rap français

En 2020 le rap francophone semblait aux balbutiements de son #MeToo sans que finalement le milieu n’opère de véritables changements. Le hashtag #BalanceTonRappeur avait éclaboussé Moha La Squale, toujours dans le collimateur de la justice après de multiples accusations d’agressions conjugales répétées. Roméo Elvis avait lui aussi été accusé d’agression sexuelle. Sa victime n’avait pas souhaité déposer plainte. En mai 2021 il était revenu sur l’affaire dans les colonnes de Télérama, disant vouloir assumer « sa faute ».

Si plusieurs collectifs se sont depuis montés pour venir en aide aux victimes dans le milieu musical, comme Balance Ta Major ou Change de Disque, le rap français reste un milieu caractérisé d’ultra masculin où peu de femmes sont nommées à des postes clés et stratégiques pour faire éclater les bulles machistes et sexistes du milieu.

Une première version de l’article stipulait que Hype Hagrah avait collaboré avec le label Rec 118. Il s’agissait d’une erreur, l’article a été updaté dans ce sens.

28 mars 2022

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