Dans un récent rapport, l’ONG Public Eye dénonce les pratiques du géant de la fast fashion.
Après que les conditions de travail proche de l’esclavagisme moderne au sein de Boohoo aient été pointées du doigt, c’est au tour d’un des leaders de la fast fashion en ligne, SHEIN, de faire l’objet de la controverse. La marque de prêt-à-porter chinoise s’est retrouvée dans le collimateur de l’ONG Public Eye à propos des conditions de travail de ses ouvriers. L’enseigne, chouchou des plus jeunes en quête de pièces tendances et bon marché, a vu ses ventes exploser grâce à Tik-Tok où le hashtag #SheinHaul génère actuellement près de 4 milliards de vues. En France, Shein est récemment entré à la 6ème place du classement des sites de e-commerce générant le plus de dépenses. Malgré un manque criant d’éthique comme le révèle le rapport « Trimer pour SHEIN » de Public Eye.
75 heures de travail par semaine
Cette success-story n’a fait qu’attiser la curiosité des ONG à la recherche des nombreuses failles que l’industrie de la fast fashion dissimule. La chaine Arte avait d’ailleurs épinglé les conditions de travail désastreuses des ouvriers de Pretty Little Thing et Boohoo dans un documentaire diffusé sur la chaîne franco-allemande. L’ONG suisse Public Eye est elle rentrée en contact avec trois femmes et sept hommes qui travaille pour SHEIN dans la région de Panyu en Chine. « Ils gagnent leur vie dans six entreprises différentes – exploitant des machines à coudre et à matelasser, travaillant dans les services de contrôle qualité et d’emballage, ou en repassant ou en coupant du tissu », détaille Public Eye.
Et ce que ces travailleurs, sans contrat de travail ni assurance, rapportent est accablant. « Les trois indiquent à peu près les mêmes horaires : de 8 h à midi, puis de 13 h 30 à 17 h 45, et enfin de 19 h à 22 h ou 22 h 30. », ce qui fait une moyenne de plus de 75 heures de travail hebdomadaire avec seulement un jour de congé par mois, explique Public Eye. Des photos partagées par l’ONG montrent également des usines surchargées en sacs, laissant très peu de place à une sortie en cas d’incendie. Aucune issue de secours n’existe et « les entrées et les escaliers ne permettent pas aux travailleurs de quitter les lieux rapidement. De plus, les fenêtres de l’étage supérieur sont grillagées », rapporte l’ONG via un enquêteur interne de que qu’on appelle le « SHEIN Village ».
Payé à l’article pour certaines usines
« Les employés sont payés à l’article ; il n’y a ni salaire de base ni prime d’heures supplémentaires ; ils travaillent 11 heures par jour et ont un ou deux jours libres par mois », détaille encore le rapport. Pour une robe vendue environ 9€40 sur le site SHEIN, la couturière sera probablement payée au maximum 3 yuans soit 41 centimes d’euros dans ces usines de productions qui ont choisi ce système de rémunération.
Dans une autre usine épinglée par Public Eye, un salaire minimum est affiché dès l’entrée. Pour couper les fils : 4 000 yuans (531€/mois) ; pour emballer les vêtements : 5 000 yuans (691€/mois) ; pour repasser : 7 000 yuans (967€/mois). « La différence de salaire pour le repassage s’explique par le fait que les ouvriers repassent les vêtements à une chaleur constante, due à la vapeur, et peuvent rarement s’asseoir », explique l’ONG. Si on fait le calcul en divisant par le nombre d’heures de travail par mois de ces travailleurs pour la plupart émigrés, une heure de travail revient entre 1 à 2 euros.
SHEIN promet des sanctions
Ce rapport vient contredire le code de conduite de SHEIN promouvant un « temps de travail raisonnable ». Loin de l’être, il est démesuré et également jugé illégal sur le sol chinois dont la loi fixe une limite de 40 heures de travail maximum par semaine, même si cette jauge est rarement respectée. À Guangzhou, ville portuaire au sud de la Chine où sont implantées les usines des fournisseurs de SHEIN, les ouvriers sont payés à la pièce, poussant les plus pauvres à travailler plus. « Nous avons un code de conduite strict pour les fournisseurs. Si une non-conformité est identifiée, nous prendrons des mesures immédiates. », a déclaré un porte-parole de la marque suite au rapport de Public Eye.
Pour en savoir un peu plus sur l’enfer de la fast-fashion, découvrez 5 documentaires sur le sujet.
18 novembre 2021