La mairie de Paris fait la guerre aux pop-up du Marais

À chaque Fashion Week, le visage du quartier change, laissant peu de place aux commerçants locaux. De quoi agacer les riverains mais aussi la Ville de Paris, qui entend bien réguler ces locations commerciales.

Un pop-store Café Kitsuné en 2024. Crédit photo : Photos : Alek Katar & Dimitri Lanctuit pour Ten Days in Paris

Récemment, un article publié sur Actu.fr a fait du bruit du côté de la capitale : la mairie de Paris n’en peut plus des pop-up stores, qui se multiplient à vitesse grand V et perturbent l’identité du Marais. Elle aurait ainsi préempté l’achat de deux espaces principalement consacrés à l’accueil d’évènements éphémères, situés rue Notre Dame de Nazareth, dans le 3e arrondissement de la capitale. Pour Nicolas Bonnet-Oulaldj, adjoint communiste au Commerce à la Ville de Paris, ces locaux perturbent en effet la vie de quartier : « Ces pop-up stores qui n’étaient pas du tout en lien avec la volonté de développer un commerce mais qui participaient plutôt à des événements autour de lancements de marques, avec beaucoup de bruit, beaucoup de monde, beaucoup de nuisances, » explique-t-il ainsi à Actu.fr. L’élu signale également que « la rue de Nazareth a une vacance commerciale très importante qui fait qu’aujourd’hui on a de moins en moins de ce qu’on appelle des commerces de proximité : commerces de bouches, boulangers, charcutiers, pharmacies. » Et précise : « Nous, ce qu’on défend à Paris, c’est le commerce physique, de proximité, indépendant. »

Pour ce faire, l’adjoint et son équipe restent à l’affut des mises en vente de locaux. « On croise avec nos données et on regarde aussi les coûts parce qu’on a un montant limité sur notre compte foncier en fonction de notre budget. » Un plafond qui ne permet ainsi par à la mairie de réguler comme le souhaiterait Nicolas Bonnet-Oulaldj : « Du côté de la rue de Nazareth, il y avait 25 locaux dans trois rues mais on ne pouvait évidemment pas acheter les 25, on n’a pas cette capacité d’achat. » Pour le moment donc, la mesure reste limitée par le manque de moyen. Mais la volonté, elle, est bien là.

La suite logique ?

La mairie tient tout de même à nuancer sa position : non, tous les pop-up ne seraient pas visés par une telle mesure. Notamment ceux qui permettent aux marques de tester leur clientèle avant d’ouvrir une vraie boutique. L’acteur public « Paris Commerce » permet d’ailleurs aux jeunes entreprises de louer un local entre 15 jours et quatre mois, en partenariat avec la Ville. Une régulation qu’aimerait élargir la mairie, désolée de voir le maillage commercial du quartier se détériorer au profit des espaces éphémères, qui, pour elle « favorisent plutôt des gens qui ont de l’argent, dans les deux sens : à la fois des marques qui ont beaucoup d’argent et qui peuvent se permettre de faire de la publicité avec un pop-up, et aussi des propriétaires qui font de la spéculation immobilière puisqu’ils ne relouent pas et qu’ils font beaucoup d’argent avec ces marques ».

Une forme d’uberisation du commerce qui ne concerne plus que les jeunes marques en quête de visibilité, mais également les grands groupes, qui louent des locaux afin de réaliser des coups marketing. Entre H&M, Zara ou encore SHEIN, les mastodontes de l’habillage y vont tous de leur pop-up parisien, maniant les liasses et ravissant les propriétaires d’espaces commerciaux parisiens. Leader de location pop-up en France, l’entreprise Nestor détient ainsi plus de 30 boutiques parisiennes, majoritairement installées dans le Marais. Interrogé par Actu.fr, Mathieu Grandjean, fondateur, l’avoue : « Aujourd’hui, deux tiers des clients de Nestore sont des grands groupes ». Pourquoi donc ne pas louer de façon pérenne, surtout dans un contexte de crise du prêt à porter ? Et bien justement, parce qu’avec la pluie de redressements judiciaires, Mathieu Grandjean et ses collègues s’assurent d’être payés à la fin d’un bail plus court. Et ne prennent pas le risque d’accueillir, entre leurs murs, une marque en difficulté.

Quant aux critiques de la Ville et des habitants du Marais, le patron de Nestore les balaie, ne voyant dans son business qu’un prolongement logique d’une dynamique du quartier déjà amorcée il y a des années. « Le pop-up dynamise quand même beaucoup Le Marais et je pense que c’est plutôt une opportunité d’attirer des visiteurs et des acteurs économiques, explique-t-il, C’est un quartier où en réalité le commerce de proximité ou de nécessité n’existe plus, ou très peu, depuis longtemps et ce ne sont pas les pop-up qui ont causé ça. Toutes les adresses avaient déjà été récupérées par des grands groupes, des marques de mode. Là, je pense que le pop-up a bon dos et on lui fait un procès qui n’a pas vraiment lieu d’être. »

3 novembre 2025

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