Les gardiennes du City Stade

De Paris à Montreuil, Assa, Djacklyne et Sally mettent le football féminin sur la carte.

Crédit photo : Hanadi Mostefa/ANCRÉ

80% de chance de pluie. En ce lundi matin d’octobre on se demande si l’on ne devrait pas reporter notre rencontre avec Sally, Assa et Djacklyne. Mais on se ravise, parce que les joueuses et les coaches de foot se présentent à l’entrainement peu importe le temps. On passerait donc pour des chochottes devant ce trio qui s’attèle à faire rayonner le football féminin dans les City Stade de Paris et sa banlieue. Surtout que les trois femmes qui vont se présenter devant nous ne lâchent jamais rien. Assa est la première, normal elle nous accueille chez elle, dans le City Stade du 20ème arrondissement de Paris, où quelques années auparavant Michael Jordan était venu inaugurer un terrain de basket accolé au revêtement ocre sur lequel on s’assoit. Sally arrive de Montreuil, ville où elle manage le pôle féminin de football constitué d’une quarantaine de joueuses et où elle a organisé la première CAN féminine de quartier l’été dernier. Djacklyne est en retard. Elle règle « une galère », avec son club de Cergy. Vous l’aurez compris, à elle trois elles quadrillent une zone qui va d’est en ouest de la capitale et sa couronne. Elles y tendent une toile d’araignée, dans laquelle les adeptes du foot féminin viennent s’accrocher. Dans le lot, les stars des plus grands clubs de France.

Crédit photo : Hanadi Mostefa/ANCRÉ

À leurs places

« À mon tournoi il y avait des joueuses du PSG », se rappelle Assa avec une teinte encore d’étonnement saupoudrée de fierté. À 21 ans, la junior du groupe officie en tant que défenseure centrale à Troyes. Si sa vie est rythmée par les entraînements et les matchs, c’est le COVID qui aura poussé la jeune femme à organiser un tournoi sur le city stade de son arrondissement. Et c’est ce foutu virus encore qui aura amené le reste de la bande à se coordonner pour s’évader un peu. « Ce qui était pratique c’est que les joueuses professionnelles étaient elles aussi à l’arrêt et elles étaient rentrées chez elles », nous explique Djacklyne. « Elles étaient en demande et disponibles », ajoute celle que ses paires surnomme l’actionnaire. Et si elle porte une casquette New Era vissée sur la tête, ce n’est sûrement pas par hasard. Le cheffe de la bande c’est assurément elle. Parce qu’elle est la doyenne, 33 ans, « l’expérience vient aussi avec les années », mais aussi parce que la trentenaire officiait au pôle marketing du football féminin chez Nike il y a encore quelques mois. Les rouages du système elle les connaît. De quoi protéger ses acolytes des marques qui veulent profiter, parfois avec un appétit d’ogre, de la tendance du foot féminin. Mais aussi des imposteurs qui voient dans ce sport un bon moyen de se faire un nom.

Crédit photo : Hanadi Mostefa/ANCRÉ

« On les voit nous les hommes qui n’ont pas réussi dans le foot masculin et qui viennent s’accaparer le foot féminin », lance Assa suivi par Sally : « Moi ce que j’ai maintenant je ne l’ai pas volé, je suis à ma place ». Avec envie et méfiance aussi, elles bossent pour que les cris de joueuses venues de toutes les villes et communes de France résonnent dans les City Stade de Paname. Cet été c’est à Argentreuil que Djacklyne a fait ses dernières classes en organisant la version féminine du célèbre tournoi de street-football Impulstar. À ses côtés, Sandy Baltimore, Léa Khelifi, Elisa De Almeida et Kadidiatou Diani du PSG féminines. Toutes avaient fait le déplacement. « Elles nous font confiance, on a un coup de fil à passer et on sait qu’on peut avoir certains noms », se gratifie Sally qui se rend compte du chemin parcouru. « On est une bande organisée », plaisante-t-elle, consciente que ce que le petit groupe a réussi à faire c’est créer une identité, une émulsion autour de ce sport. « L’empowerment c’est très important », assure Djacklyne qui distille ses conseils à chaque fois que les filles la sollicitent. Et ces derniers viennent aussi des grands frères du quartier. « C’est eux les premiers qui nous ont poussé à s’imposer. Ils ne nous font pas de cadeau, et ils ont raison c’est comme qu’on apprend », glisse Assa. Même son de cloche pour l’actionnaire : « Pour le tournoi Impulstar on ne nous a pas déroulé le tapis rouge parce que nous étions des femmes. Il fallait tout simplement être au niveau ».

En les quittant en ce lundi soir on sait qu’on se reverrai bientôt, que l’aventure ne fait que commencer pour ce trio qui compte un « noyau dur d’une dizaines d’activistes ». Et si vous doutiez encore du pouvoir d’Assa, Sally et Djacklyne alors laissez-nous vous dire qu’en quittant le City Stade du 20ème arrondissement, les gamins présents ce lundi après-midi ont crié : « voilà la dream team ! ». Et la vérité sort toujours de la bouche des…

Crédit photo : Hanadi Mostefa/ANCRÉ

Pour les suivre :

@Djacklyne
@Doucoure__75
@Sallyyeezy

26 octobre 2021

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