La marque attaque le set designer du shoot et réclame 25 millions de dollars.
Depuis quelques jours Balenciaga est sous le feu des critiques pour deux campagnes dévoilées récemment sur son site internet. L’une est dédiée aux nouveaux objets de la marque de luxe et met en scène des enfants portant des ours en peluche habillés de façon BDSM. Si l’association de bambins avec un univers sexualisant a été décriée, c’est également l’utilisation d’un document relatif à une affaire de pédopornaographie pour une autre campagne qui est pointé du doigt. Sur le site de Balenciaga, derrière la photo d’un sac à main issu de la collab avec adidas, en zoomant les internautes ont découvert un document relatif à une affaire de 2008 traitée par la Cour Suprême américaine, opposant les États-Unis v. Williams, et qui portait sur des abus sexuels sur enfants.
À l’époque, un homme nommé Michael Williams avait été repéré par un agent en ligne après avoir posté des images d’enfants âgés d’environ 5 à 15 ans, se livrant à des comportements sexuellement explicites et exhibant leurs organes génitaux. Les services secrets américains avaient ensuite obtenu un mandat de perquisition au domicile de M. Williams, où deux disques durs contenant au moins 22 images de vrais enfants se livrant à des actes sexuels explicites, dont certains à caractère sadomasochiste, avaient été saisis.
Ce que reproche Balenciaga à la société de production du décor du shoot
Face au tollé provoqué, Balenciaga a intenté une action en justice contre la société de production North Six, Inc. et son agent, Nicholas Des Jardins. L’homme est derrière le décor de la campagne Printemps 2023 mettant en scène le sac adidas x Balenciaga. Dans les documents de justice déposés auprès de la Cour suprême de l’État de New York le 25 novembre, Balenciaga stipule que la société de production a commis des “actes et omissions inexplicables” qui étaient “malveillants ou, à tout le moins, extraordinairement imprudents”. Les avocats de Balenciaga demandent “réparation pour les dommages importants qu’ils (la société de production et son agent, ndlr) ont causés dans le cadre d’une campagne publicitaire que Balenciaga leur a demandé de produire”. Balenciaga affirme que les défendeurs ont “inclus certains documents dans les photographies de la campagne”, sans l’accord de la marque et à son insu. Balenciaga demande 25 millions de dommages et intérêts en raison du faux lien que le public mais aussi les médias ont fait entre une affaire de pédo-pornographie et la marque de luxe.
“Nous prenons cette affaire très au sérieux et engageons une action en justice contre les parties responsables de la création du décor et de l’inclusion d’articles non approuvés pour le photoshoot de notre campagne printemps 23. Nous condamnons fermement l’abus d’enfants sous toutes ses formes. Nous défendons la sécurité et le bien-être des enfants”, a depuis communiqué Balenciaga qui ne nomme pas le photographe Gabriele Galimberti dans sa plainte. Ce dernier qui a immortalisé la campagne avec les enfants s’est exprimé depuis sur Instagram : “Je ne suis pas en mesure de commenter les choix de Balenciaga, mais je dois souligner que je n’avais pas le droit, de quelque manière que ce soit, de choisir les produits, ni les modèles, ni la combinaison de ces derniers“. Il précise : “La direction de la campagne [commerciale] et le choix des objets exposés ne sont pas entre les mains du photographe.”
Un mea culpa tardif
Si l’équipe marketing de Balenciaga a bien validé la campagne publicitaire avec les enfants, il se pourrait en revanche qu’elle n’ai pas prêté attention aux documents utilisés sur la seconde campagne Printemps 2023. Ces derniers ont été repérés par les internautes en zoomant sur les photos. C’est en tout cas l’axe de défense de la marque du groupe de luxe Kering qui, acculée et accusée de ne pas prendre ses responsabilités, a publié un communiqué ce 28 novembre.
La marque reconnait des manquements de ses équipes pour les deux campagnes. Tout d’abord celle avec les enfants : “Nos sacs ours en peluche et la collection “Gift” n’auraient pas dû être photographiée avec des enfants. C’est un mauvais choix de la part de Balenciaga, combiné à notre incapacité à évaluer et à valider les images. La responsabilité de cette situation incombe uniquement à Balenciaga“, écrit la marque. Pour la campagne Spring 23, Balenciaga explique que les documents utilisés “ont été fournis par des tiers qui ont confirmé par écrit que ces accessoires étaient de faux documents de bureau”. Or, “il s’est avéré qu’il s’agissait de véritables documents juridiques provenant très probablement du tournage d’une série télévisée. L’inclusion de ces documents non prouvés est le résultat d’une négligence imprudente pour laquelle Balenciaga a déposé une plainte. Nous assumons l’entière responsabilité de notre manque de surveillance et de contrôle du document en arrière-plan et nous aurions pu faire les choses différemment”, reconnait la griffe.
La marque s’est engagée à revoir ses process internes de validation et dit travailler avec des associations luttant contre les abus sexuels auprès des enfants.
I contacted the photographer Gabriele Galimberti. He’s issued a statement via Insta. He says the court document image was not his & that he basically just showed up to do a job. He sent me a further quote. As we knew, despite solely blaming him, Balenciaga were FULLY involved. pic.twitter.com/RTfy3GTZoN
— Sonia Poulton (@SoniaPoulton) November 24, 2022
Ce que dit la société qui a élaboré le décor
De son côté l’agent du décorateur Des Jardins, Gabriela Moussaieff, est montée au créneau stipulant que son client était “utilisé comme un bouc émissaire” par Balenciaga. “Tout le monde chez Balenciaga était présent sur le tournage et sur chaque photo, et a travaillé sur le montage de chaque image en post-production”, a-t-elle détaillé Quant aux documents polémiques, renseignant sur l’affaire U.S. v. Williams et d’autres documents que l’on peut voir dans la publicité Balenciaga ils “ont été obtenus auprès d’un accessoiriste et qu’il s’agissait de pièces de location utilisées [pour] les séances de photos.“, assure Moussaieff.
Face au bad buzz, Kim Kardashian égérie Balenciaga, s’est récemment dite choquée par la campagne mettant en scène des enfants et des accessoires relatifs à l’univers du BDSM. “Quant à mon avenir avec Balenciaga, je suis en train de réévaluer ma relation avec la marque, en me basant sur leur volonté d’accepter la responsabilité d’un événement qui n’aurait jamais dû se produire – et sur les actions que j’attends d’eux pour protéger les enfants”, a écrit la femme d’affaires américaine dans une série de tweets.
As for my future with Balenciaga, I am currently re-evaluating my relationship with the brand, basing it off their willingness to accept accountability for something that should have never happened to begin with — & the actions I am expecting to see them take to protect children.
— Kim Kardashian (@KimKardashian) November 28, 2022
28 novembre 2022 – Cet article a été modifié après la publication du communiqué de Balenciaga (22h16)