Rencontre avec Sara Björk Gunnarsdóttir, première joueuse de l’OL à être tombée enceinte

Elle se confie dans le documentaire “Do Both”, après son accouchement.

Crédit photo : PUMA

Être enceinte et jouer au foot au niveau professionnel. Vouloir continuer à gagner des titres tout en fondant une famille. Voici les questionnements auxquels a été confrontée la joueuse de l’Olympique Lyonnais, Sara Björk Gunnarsdóttir. L’islandaise qui évolue dans le championnat français, est devenue la première femme du collectif des Gones à tomber enceinte durant sa carrière professionnelle. Un événement inédit dans l’histoire du club, qui a poussé la jeune femme à devoir se préparer pour mener carrière professionnel et vie de maman. De retour sur les terrains quatre mois après avoir accouchée le 16 novembre dernier d’un petit garçon, elle nous confie son chemin de croix. Celui d’une athlète qui a dû faire face à ses propres doutes mais aussi au manque d’information sur les grossesses des sportives. Rencontre à Lyon, en marge de la projection du documentaire “Do Both” (Faire les deux) qui lui est consacré et réalisé par PUMA et Copa 90.

ANCRÉ : Vous avez dit – “revenir en tant que mère pour moi c’est très spécial” – Qu’est-ce-que vous avez voulu dire par spécial ? 

Sara Björk Gunnarsdóttir : Revenir jouer à ce niveau, revenir en tant que mère était très spécial pour moi car c’est quelque chose dont j’ai rêvé, avoir une famille, un bébé, mais pour être honnête, je ne savais pas que cela arriverait pendant ma carrière. Quand vous tombez enceinte et que vous êtes une sportive ce ne sont pas toujours des discussions positives dans un premier temps. On parle toujours de la façon dont celles qui font ce choix vont mener leur carrière après, du soutien financier qu’elles vont recevoir ou non durant leur contrat en club, de la façon dont elles vont réussir à faire les deux, car il faut beaucoup de temps et d’efforts pour être une athlète de haut niveau. C’était donc très spécial pour moi de revenir sur le terrain après avoir eu un bébé et de réussir à faire ce que j’aime faire : jouer au football au plus haut niveau.

Avez-vous célébré votre retour comme une victoire ou presque ?

Oui, je l’ai fêté, mais je savais aussi que ce serait très dur après. Et ça l’est. Je pense que maintenant que la saison est terminée, je vois ça comme une victoire, mais je sais aussi que c’est un peu comme le début d’un long voyage. Gagner des titres, des matchs et aussi expérimenter mon nouveau rôle de mère, tout ça en même temps. Mais je suis aussi très reconnaissante de pouvoir faire les deux.

Vous avez dit vouloir être une voix pour ces autres footballeuses et sportives qui ont peur de faire les deux. Vous le dites aussi, vous êtes toujours dans la découverte, l’apprentissage. Comment vous adressez-vous à ces autres femmes ? Quels messages portez-vous ?

La confiance en moi elle arrive quand je me dis : mais regarde tu le fais chaque jour. J’ai autour de moi des femmes qui ont eu un bébé et qui sont revenues sur le terrain, peut-être pas à ce niveau, mais elles le font quand même. Et je sais maintenant que ce sont des femmes fortes. Mon petit ami et moi ne vivons pas ensemble, il joue à Rodez et cela demande beaucoup d’efforts. Mais je pense toujours qu’il est important de rendre mon expérience visible, de montrer aux autres femmes qu’elles peuvent le faire aussi. C’est difficile mais c’est possible.

Quelles ont été vos plus grosses craintes ?

Les doutes et les peurs sont apparus lorsque j’étais enceinte. C’était ma première fois et je connais très bien mon corps en tant qu’athlète professionnelle, ce que je dois manger, comment m’entraîner, comment récupérer, mais pas en tant que femme enceinte. Il y a tellement de nouvelles choses que vous ignorez qui vont vous arriver. Est-ce que je vais réussir à gérer le stress entre accoucher et en même temps vouloir revenir au plus haut niveau ? Comment je vais m’organiser ? Je ne suis plus “ma numéro un”, mon bébé l’est et je passe en second. C’est effrayant par moment. Je me demande parfois : est-ce que je fais de mon mieux ? Mais oui, je le fais, mon bébé est heureux et en bonne santé.

Où trouve t-on des conseils quand on est une athlète qui attend un enfant ? Qui vous accompagne ?

Les clubs doivent être plus conscients que cela peut arriver. La plupart des clubs ne sont pas préparés à ce que leurs joueuses tombent enceintes. Ils n’ont pas d’équipes spéciales qui savent comment former une joueuse de football professionnelle enceinte. Je n’ai pas trouvé les connaissances nécessaires, alors j’ai dû chercher ailleurs durant cette expérience. Je suis retournée en Islande, car il y avait un entraîneur qui avait déjà formé d’autres femmes de mon équipe nationale qui sont devenues mères au cours de leur carrière. J’ai également reçu l’aide d’une société appelée Orecco, que Puma m’a conseillée. Ils m’ont aidée pour mon sommeil, ma récupération, ma nutrition. Ils sont spécialisés dans le corps des femmes dans le sport, ainsi que dans la manière dont les règles peuvent affecter vos performances et votre entraînement. J’ai dû chercher beaucoup de connaissances, même lorsque j’ai demandé à ma sage-femme, elle n’avait pas l’habitude de parler à des femmes qui s’entraînent à mon niveau. Je devais également faire attention aux limites que je pouvais atteindre, car il ne s’agissait pas seulement de moi, mais aussi de mon bébé.

Crédit photo : PUMA

Avez-vous toujours besoin d’un suivi post-accouchement ?

J’ai toujours besoin de quelqu’un qui puisse m’encadrer. C’est ce que fait Orecco. Ils me questionnent sur comment se passe mon sommeil et mon alimentation. Comme je n’ai pas beaucoup de temps, je peux oublier de manger par exemple. Le simple fait de prendre des nouvelles me rappelle que je dois faire attention à telle ou telle chose pour m’entraîner à ce niveau. C’est bien d’avoir ça, ça m’aide aussi à établir des priorités pour mon bébé. Mais en ce qui concerne l’entraînement et les exercices, je recommence à faire ce que je faisais avant. Je vérifie juste mon bassin, mon plancher pelvien, c’est quelque chose que j’ai surveillé de près pendant ma grossesse parce que c’est la partie de votre corps qui change le plus. Je me concentre là-dessus.

Avez-vous eu des discussions avec vos co-équipières de l’OL ? Comment ont-elles réagi ?

Elles étaient sous le choc, c’était la première fois dans l’histoire du club. Elles étaient aussi très heureuses et elles avaient les mêmes questions que moi. “Sera-t-elle capable de revenir au niveau professionnel ?” – Mais cela a aussi ouvert une porte pour elles, ça a permis la discussion. Vous voulez être enceinte ? Vous pouvez le faire aussi, et vous pouvez le faire pendant votre carrière. Elles m’ont vu travailler comme une folle pour revenir, donc elles sont aussi témoins du travail que cela demande. Si elles veulent elles aussi passer par cette étape, elles peuvent. Je suis très fière de penser que je peux être un exemple pour elles, surtout pour Amel Majri qui est enceinte en ce moment et qui fait partie de l’équipe de l’OL. Elle me pose beaucoup de questions, et je suis heureuse de pouvoir lui donner quelques informations, mais il faut aussi garder à l’esprit que chaque grossesse est différente, il faut écouter son propre corps. En revanche je suis en mesure aujourd’hui d’être celle qui peut partager certaines connaissances. De plus, les athlètes ont un corps qui se régénère très vite, ils savent comment s’entraîner, ils savent comment être sous pression. Alors on peut faire les deux.

17 mai 2022

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