On a écouté le nouvel album du rappeur belge, qui offre un voyage onirique.
Bien mal leur en a pris, à ceux qui ont cru que derrière le “J’me ramolli” de 911, Damso se posait comme un rappeur ayant perdu sa noirceur. Une prophétie lancée par internet, qui disait que les dieux du rap ne pouvaient plus rien pour lui. Comme si la meute avait oublié que Damso pouvait être le divin lui-même. Un créateur qui dit que “l’alcool brun ne lui fait plus d’effet” (Τ. Chialer ft YG Pablo), mais qui n’a jamais imaginé allonger son rap avec des glaçons. On the rock ? Jamais. Plutôt on the edge. Accroché à une falaise depuis laquelle il nous suspend, Damso nous explique avec son nouvel album QALF Infinity, qu’il a eu le vertige lui aussi, mais qu’après la peur vient l’éclaircie. Qu’après ou avant l’amour vient l’ejac faciale.
Mais il ne s’agit pas d’une éjaculation précoce pour quelques vues sur Youtube, comme ce que trop de rappeurs français qui semblent être passés complètement à côté de la révolution féminine, nous proposent. Le Belge a plutôt lu le kamasutra du rap. Presque l’un des seuls d’ailleurs, qui arrive à savoir manier les figures sans transition, parfois tendre, parfois brusque. C’est ce qu’on retiendra de cet album, arrivé sept mois après QALF. Un grand huit d’émotions. Des trois titres en un seul morceau (The Vie Radio), des allures de grand-messe où le prêtre qu’il se dessine côtoie l’enfer dans les dernières secondes d’une instru orpheline de toute vie terrestre. “J’sais pas pourquoi t’as peur de vieillir, la mort c’est bien, vu que personne n’en revient”, rappe-t-il dans « LIFE LIFE ». Pas de démons sans péché, pas de Damso sans sincérité.
Derrière toute la complexité musicale de l’album, se cache une vérité simple : le silence est d’or, la parole est d’argent. Parce qu’il ne faudrait pas oublier la mise en retrait de Dems, une retraite quasi spirituelle qui lui a permis de peaufiner ce disque depuis presque un an. Un silence presque insolent, à l’heure où l’industrie musicale pense qu’il faut sortir un son par jour, qui fait qu’on apprécie autant ses disparitions que ses résurrections. Toujours dans la vision, jamais dans l’hallucination. “Je fais louer ma vie sur terre pour acheter celle de l’au-delà”, rappe-t-il dans “Ψ. Passion”. À la fois bailleur mais jamais mauvais payeur.
Parce que Dems est “toujours sur le cou, comme chaîne en or”, même si la célébrité lui aura ramené moula et malaise. “Et plus j’avance dans mon rang social, plus je recule dans ma vie sociale”, lance t-il quasi laconique. S’il console ses pleurs dans un solo de saxophone (MOROSE), il déclenche les nôtres : “J’vais t’faire chialer. Toutes les larmes de ton corps m’appartiennent désormais”.
Tout le rap français t’appartient désormais.
QALF Infinity est disponible sur toutes les plateformes de streaming.