Entre augmentation des matières premières et baisse du pouvoir d’achat des français, les marques indépendantes, notamment éthiques, peinent à garder la tête hors de l’eau.
Comme des millions de français, vous avez sûrement remarqué que le ticket de caisse ou la facture d’électricité sont de plus en plus salés ces derniers temps. La responsable : l’inflation, aka la perte du pouvoir d’achat de la monnaie, qui crée une augmentation des prix. Elle atteint un niveau inhabituel, avec une moyenne de 9,1% en Europe et de 6,2% en France. Notamment due à la montée du prix des énergies après la crise du COVID*, et à la hausse des coûts de certains produits suite à la guerre en Ukraine (pétrole, gaz, huile, blé), cette flambée générale ne bouscule pas que les particuliers : les petites entreprises se retrouvent en grande difficulté, et la mode n’est pas épargnée.
Une crise généralisée
Si l’alerte a déjà été lancée en août par The Greenimalist, la situation empire cet automne. Les Récupérables, Ateliers Unes, et beaucoup d’autres marques ont annoncé leur fermeture ces dernières semaines. Olly lingerie, label engagé soutenu par près de 50 000 followers, raconte dans un post Instagram comment l’inflation a fait baisser ses ventes et menace le projet. Les marques éthiques sont les premières à être touchées : en utilisant des matières de qualité et en payant leurs ouvrier·ères au prix juste, elles pratiquent déjà des tarifs élevés hors inflation et réalisent des marges très petites. Alors en temps de crise, ça pète. “Le problème est double, entre l’augmentation des matières et le pouvoir d’achat des gens qui baisse”, nous résume Linda Kaelin, créatrice de la marque responsable KIND STUDIO.
Coûts augmentés, clients stressés
Linda raconte comment produire des vêtements devient de plus en plus cher : “Depuis le début de l’année déjà, on reçoit des mails de fournisseurs qui augmentent le thermocollant, les matières premières, les tissus, des boutons… On les reçoit un par un, de quasiment tout le monde. Ça arrive même plusieurs fois, parfois on passe de 10% à 20% d’augmentation. Au début, c’est pas beaucoup. Mais mis bout à bout…”. Avec la hausse des coûts du pétrole, les livraisons clients ou le shipping des pièces depuis les ateliers ont aussi flambé.
Pour préserver sa marque de ces coûts ingérables, Linda ne produit pas de nouvelle collection cet hiver et propose les pièces des saisons précédentes sur son eshop. Un choix prudent, mais complexe à rentabiliser vu le pouvoir d’achat actuel. “Ça s’est tendu dès l’hiver dernier, parce qu’il y avait déjà la crise liée au COVID. Là, on sent que les clients sont beaucoup plus frileux. Et il y a un climat général, où on répète ‘Attention tout le monde, c’est la crise, c’est l’inflation’. Ça crée un cercle vicieux où même les gens qui en auraient les moyens, vont se dire qu’il faut faire plus attention.” Dans cette situation, la mode est la dernière priorité de nombreuses personnes qui vont se concentrer sur les achats essentiels.
L’effet boule de neige
Et les galères dans les chaînes de production ne sont pas prêtes de s’arrêter, remarque Vogue Business, à cause du dérèglement climatique et de la météo extrême qui en découle. La production de coton américain a par exemple chuté après les sécheresses texanes, et les inondations au Pakistan, qui ont touché plus de 30 millions de personnes, ont aussi affecté 40 % du rendement annuel du coton.
Ces changements affectent l’entièreté de l’industrie, mais les entreprises indépendantes sont les premières à en souffrir, financièrement et moralement. “Tu ajoutes à ça que chaque semaine il y a une marque indépendante qui ferme, les ventes qui baissent, les prix qui augmentent… C’est un truc qui se rajoute après l’autre… on finit par se demander si c’est une bonne idée de continuer.” confirme Linda.
Pour lutter contre ce phénomène, n’hésitez pas à soutenir les marques indépendantes que vous aimez, en achetant si vous pouvez ou en les faisant connaître sur les réseaux sociaux.
* D’après viepublique.fr : “Les prix à la consommation du gaz, des carburants et dans une moindre mesure de l’électricité ont fortement augmenté en France entre décembre 2020 et octobre 2021 (respectivement de 41%, 21% et 3%). La tendance se poursuit en 2022 : l’énergie est, pour plus d’un tiers, la principale composante du taux d’inflation.”
14 novembre 2022