À Laval, ville natale d’Aubameyang, les filles rêvent de collectif et de victoires.
À Laval, ville natale de l’attaquant d’Arsenal Pierre-Emerick Aubemayang, le foot féminin se développe. Il suffit de pousser la porte du club house de l’AS Bourny, quartier situé à l’ouest de cette ville de 67 000 habitants en pleine expansion depuis l’installation de la ligne SNCF à très grande vitesse, la plaçant à seulement 1h15 de trajet de Paris. Et si ce quartier pavillonnaire du Bourny avait vu des maisons quasi toutes identiques avaler ses anciennes étendues d’herbe à partir des années 80, quarante ans plus tard, les gamins qui peuplaient le quartier sont devenus adultes. Alors pour Adrien, la trentaine passée et coach des féminines, il faut jouer du bouche à oreille pour recruter. Et la bonne vieille technique fonctionne. Puisque trois ans après son arrivée au club, il est passé d’une seule équipe féminine à trois. Une augmentation qui résulte aussi de l’engouement grandissant autour du foot féminin depuis ces dernières années. Le nombre de licenciées a bondi de moins de 90 000 en 2010-2011 à plus de 200 000 en 2020, constatait la FFF dans un rapport publié en mars 2021.
En avalant son café en ce samedi matin de septembre, il n’est pas peu fier du chemin parcouru. “L’individualité au service du collectif. C’est ce que je répète toujours à mes joueuses”, nous avait-il glissé la veille alors que sa nouvelle équipe senior s’entrainait sur le terrain synthétique flambant neuf de l’AS Bourny. Une maxime qu’il s’est imposé à lui même et qui est écrite en rouge sur le tableau veleda qui trône dans le vestiaire partagé par les U13 et U15 en ce samedi 11 septembre. Le box rouge et blanc, fait écho aux couleurs d’Arsenal. Club dans lequel un autre lavallois, Francis Coquelin, enfant du quartier du Bourny et licencié au club à ses débuts, a passé la plupart de sa carrière de 2011 à 2018. Face au maillot de l’ancien Gunner accroché au mur, Adrien peaufine sa compo.
Second poteau Najette
“Celles qui ont oublié leurs protège-tibias vous serez gardienne. Ça tombe bien, on n’en a pas”. Pour ce premier match amical, l’enjeu c’est “de produire du jeu, on s’en fout des buts”, glisse Adrien avant de récolter les portables de tout le monde. À ses côtés, Charly, nouvel alternant recruté par le club est en études à la Win Sport School, première école dédiée au sports marketing dans la ville. “Les filles c’est différent des garçons, au delà de la gagne, elles veulent jouer ensemble” nous confie t-il bord terrain. Une mentalité qui a séduit le garçon qui en plus de gérer la communication du club, entraine l’équipe senior. De 17 à 54 ans, elles se retrouvent deux fois par semaine, avec match le dimanche. Kadiatou maillot sur le dos emmène avec elle son fils de 5 mois, déclaré mascotte de l’équipe. “Personne ne peut le garder, alors on se relaie pour s’occuper de lui durant les matchs”. L’individualité au service du collectif, encore. Si Najette et Christine, les mamans de l’équipe habitent ici, les plus jeunes se demandent si elles doivent quitter Laval pour leurs études. “J’achèterais un minibus et je viendrais vous chercher dans chaque ville pour aller à l’entrainement”, plaisante Adrien en fin de séance.
“Benzema, Kimpembe, Mbappé, Eugénie Le Sommer, Amandine Henry…”, les noms fusent quand on demande aux U15 de nous donner leurs exemples dans le ballon rond. Tous sont français. Et dans cette ville moyenne de province, le match de gala joué par l’équipe de France féminine en 2019 au stade Francis Le Basser, fief du Stade Lavallois, a largement participé à la cohésion du groupe. Adrien le reconnait : “Je cite souvent des références de garçons, par habitude, mais les filles connaissent leur sujet et ça va venir avec le temps”. Ce qui vient aussi, c’est la place gagnée par les filles pour s’imposer dans ce club qui compte quasiment une dizaine d’équipes masculines. “Moi j’ai demandé à ce que ce match soit joué sur le synthétique. C’est simple, les filles doivent avoir le même traitement que les garçons sinon j’me barre”, nous lance le coach. Épaulé par le directeur de l’AS Bourny, il repart ce samedi avec une première victoire. 11 à 0. Sans vraie gardienne. Dans les vestiaires on lance un dernier cri de guerre. “Oh non tu ne vas pas encore nous mettre ton vieux Naps là”. Trop tard, les portables ont été récupérés, ils sont posés sur la table pour une dernière chorégraphie qui finira sur Insta et Snap. “C’est la kiffance, c’est la kiffance”.
11 septembre 2021