Acquise par le groupe en 2014, la marque de produits capillaires destinés aux cheveux texturés Carol’s Daughter retrouve son indépendance des premiers jours, comme l’a annoncé sa fondatrice sur Instagram.
Crédit photo : Tayo Kuku, Jr.
Créée en 1993 par Lisa Price, Carol’s Daughter commence son histoire bien loin des grandes enseignes, dans une cuisine de Brooklyn, à une époque où les cheveux texturés ne constituent pas encore le marché qu’on connaît aujourd’hui. Peut-être est-ce ce manque de propositions adaptées aux cheveux bouclés à crépus – dont des célébrités telles que Mary J. Blige ou Erykah Badu vantent publiquement les mérites – qui poussent les grands groupes à s’y intéresser, un peu sur le tard, L’Oréal en tête de file, que Lisa Price a annoncé quitter, après 10 ans de collaboration.
Grisée par le succès inattendu de sa marque, la New-Yorkaise s’était associée au géant de la beauté français en 2014, sans souhaiter faire de compromis : oui, Carol’s Daughter va s’étendre. Non, elle ne renoncera pas à son authenticité. L’Oréal accepte et s’en suit alors un partenariat d’un peu plus de 10 ans, durant lequel Carol’s Daughter s’impose comme une référence pour le “black hair” quand, L’Oréal, lui, conquiert enfin un marché qui lui échappait jusqu’alors. Un win-win qui n’a visiblement pas achevé de convaincre Lisa Prince, qui a récemment annoncé sur ses réseaux vouloir retourner à l’indépendance. “Faire partie de la famille L’Oréal nous a donné la possibilité de toucher tellement de vie, relate la créatrice de Carol’s Daughter, Cette aventure a été extraordinaire. Mais mes rêves ne sont pas terminés, aujourd’hui, je commence un nouveau chapitre et retrouve l’esprit indépendant de ma marque en tant que fondatrice de toujours, et nouvelle présidente”.
“Une nouvelle étape plus audacieuse”
Si la raison de ce départ n’est pas directement évoquée par Lisa Price, la fondatrice précise tout de même que cette nouvelle étape sera “plus audacieuse, sans crainte, sera tournée vers l’innovation en ne se contentant pas de suivre les tendances, mais en les imposant. Plus important encore, il s’agit d’approfondir notre engagement envers vous, la communauté qui nous a construits, envers chaque personne qui a cru en moi, envers ceux d’entre vous qui ont été aux côtés de Carol’s Daughter dès le premier jour.” Et oui, malgré les gros sous et l’expansion phénoménale, la machine du grand groupe peut tendre à faire oublier d’où l’on vient… et donc s’éloigner de son message de départ. Malgré les engagements en faveur de la diversité prônés chez L’Oréal.
C’est en tout cas ce que semble sous-entendre Lisa Price, qui a tout de même été célébrée par le PDG de la branche américaine, David Greenberg : “Nous sommes fiers du long héritage de Carol’s Daughter et de l’impact transformateur qu’il a eu sur l’industrie de la beauté. Au cœur de cet héritage se trouve Lisa Price, une entrepreneure qui a toujours été en avance sur son temps et qui a fait de Carol’s Daughter une marque appréciée qui rend hommage et célèbre les femmes de couleur depuis des décennies.” Si la séparation semble s’être faite à l’amiable, cela reste néanmoins une victoire pour Lisa Price qui, dans un climat politique particulièrement tendu pour les entrepreneurs noirs, prouve que les “black owners” ne se contentent pas simplement d’exister, mais fleurissent et s’épanouissent, même lorsque les lois ne leurs sont pas favorables.
“Black Section” in target is already a majority white-owned brands or brands that have sold to large corporations
byu/fuckthisishardshit inNaturalhair
Depuis les nombreux décrets de Trump concernant les programmes DEI (diversité, équité, inclusion, ndlr), les marques tenues par des femmes noires s’émancipent peu à peu des grands groupes auxquels elles appartenaient alors, parfois contre le gré, contrairement à Lisa Price. De quoi encourager les communautés à se soutenir entre elle, même lorsque l’on est un simple acheteur. Au Minnesota, des organisations telles que Black Lives Matter Minnesota, le Racial Justice Network et la section locale du Conseil des relations américano-islamiques ont appelé au boycott national de Target, la chaîne de supermarché incarnant à elle seule le recul des lois progressistes. « Nous encourageons chacun à acheter directement auprès des entreprises noires via leurs sites web, plutôt que de se rendre dans les magasins Target », a déclaré Monique Cullars-Doty, fondatrice de Black Lives Matter Minnesota, dans un communiqué. Ou quand le « black dollar » revient directement au « black owner ».
14 mars 2025