Je suis musulman, juive ou athée et je fête Noël

Le soir du réveillon, ils dîneront en famille et ouvriront peut-être même quelques cadeaux. Adlane, Ludivine, Mrim, Myriam, Seda, Gabrielle et Jullia nous racontent.

Le Noël de Jullia, athée, mais qui respecte une certaine tradition

“Noël pour moi, c’est clairement traditionnel, une bonne excuse pour se réunir, manger et se faire des cadeaux”, amorce Jullia, issue d’une famille athée. Même discours pour Adlane, qui fête Noël en famille tous les ans en tant que musulman : “Même si on doit pas le fêter religieusement parlant, quand t’es en France, tu joues le jeu assez facilement. D’autant plus quand tu as un enfant qui veut faire comme les copains de l’école”. S’il n’est pas question d’aller à la messe ou d’installer une crèche au pied de son sapin, les autres éléments principaux du réveillon sont présents dans de nombreux foyers : arbre décoré, repas copieux, présents… Si, à l’origine, Noël est une fête religieuse célébrant la naissance de Jésus, la fête est aujourd’hui devenue le marqueur culturel de toute une société occidentale, comme le rappelle une étude de l’Ipsos soulignant que 91% des Français fêtent Noël chaque année. Alors, à quoi ressemblent les soirées du 24 décembre chez les non-chrétiens ?

Noël avant tout pour les enfants

Largement tournée autour des bambins, la célébration prend des formes différentes selon les âges. “Je suis de confession juive et mes parents nous ont laissé croire au Père Noël, comme les autres enfants de l’école, et ils nous offraient des cadeaux. Sans fête par contre, il y avait juste des cadeaux dans la cheminée quand on se réveillait le 25 au matin, se souvient Gabrielle, Mais quand j’ai arrêté d’y croire, vers mes 6/7 ans, ils ont arrêté de nous en faire et donc je n’ai pas fêté Noël jusqu’à mes 15 ans. À partir de cet âge-là, j’étais souvent invitée chez ma meilleure amie qui le fêtait en famille, malgré le fait qu’elle était de confession musulmane. Pourtant, c’était vraiment le gros repas, le sapin, les cadeaux…”

Le Noël d’Adlane, musulman, mais attaché à la fête pour sa fille

Adlane, lui, l’avoue : il ne fêterait probablement pas Noël si ce n’était pas pour les enfants. “Ma fille me demande pourquoi on n’a pas de sapin à la maison, et on veut éviter la frustration. Alors on l’emmène au marché de Noël pour voir le Père Noël, on ne veut surtout pas lui enlever l’aspect magique de ces fêtes. Elle croit au Père Noël, comme à la petite souris. On ne veut pas lui retirer cette innocence là, même si on sait que c’est délicat vis à vis de notre religion, qu’on lui apprend en parallèle”. Nombreux sont les enfants autour desquels la famille non-chrétienne a tenté de créer de nouvelles traditions, afin de coller aux attentes des plus jeunes, nourris par cet esprit de fête à l’école, auprès de leurs amis, ou au cinéma. “Vivre ta religion tout en vivant dans un pays comme la France, c’est ne pas pouvoir se détacher de ces influences, rappelle Adlane, T’es obligé de composer un peu, sans pour autant mettre de côté ce en quoi tu crois vraiment”

Pour Myriam, “fille d’une mère juive et d’un père musulman aujourd’hui séparés”, Noël n’est pas une fête religieuse mais bien traditionnelle”. Elle développe : “Je le fête avec la famille du côté de ma mère depuis toujours. C’est une célébration qui possède une dimension spirituelle, mais aussi fédératrice car elle rassemble les familles. Et même si nous ne sommes pas chrétiens ou catholiques, il nous a toujours paru naturel de le fêter tous ensemble. On mange, on parle, on boit, on joue à des jeux, on chante tous ensemble et on s’offre des cadeaux”

Un sentiment également partagé par Ludivine, dont la famille est athée : “Je ne vis pas cette fête sous un angle religieux. Ce qui compte avant tout, ce sont les traditions familiales. Noël est devenu un moment précieux de partage et de convivialité, où l’on se réunit pour passer du temps ensemble, se créer des souvenirs. La valeur principale pour moi, c’est la famille et l’esprit de générosité qui l’accompagne, bien loin d’une quelconque connotation religieuse.” Une occasion en or pour se rassembler dans un monde qui bouge si vite, quitte à mettre ses convictions (un peu) de côté. Bien que Mrim, de confession musulmane, ne fête pas Noël, elle “participe au repas de Noël avec [sa] belle-mère pour qu’elle ne se retrouve pas seule le soir du 24”.

“Mes enfants ont compris que l’on faisait un effort pour Mamie Douce, la mère de mon mari qui est un français converti et qui ne fête plus Noël depuis”. Élément central des festivité, le repas revêt également de différentes formes selon les coutumes de chacun. “Nous, on est très “mets traditionnels”, nous explique Ludivine, Champagne, foie gras, huîtres, saumon… un vrai repas de Noël à la française quoi ! Parfois, on fait quelques jeux et, surtout, on rigole beaucoup. À la fin du repas, on ouvre nos cadeaux tous ensemble et on s’embrasse pour se remercier. Je sais que ça peut sonner un peu comme une scène de film américain, mais sincèrement, je ne changerais ces Noël pour rien au monde.” Un repas copieux qui se poursuit le 25 pour Jullia, qui ouvre ses cadeaux le lendemain autour d’un gros déjeuner. “En général à ce stade, il y a toujours un tube de gaviscon vide qui traîne dans la cuisine”, plaisante-elle. 

Le Noël de Jullia, athée

Se créer ses propres traditions

Si l’esprit des fêtes touche un bon nombre de Français, chacun sa manière de l’embrasser et de l’exprimer. Ainsi, alors que l’on retrouve dans les familles chrétiennes des rituels liés à la nativité, chez les autres, la fête de Noël prend de nouvelles formes. “Chez nous, il n’y a pas de messe de Noël, pas de croix, ni de crèche. Pendant longtemps, j’avais des calendriers de l’Avent avec des chocolats, mais c’est une tradition qui s’est un peu perdue avec le temps, surtout maintenant que j’ai grandi. Chaque année, je mets un point d’honneur à faire un beau sapin, surtout pour l’aspect visuel. Les décorations de Noël sont un véritable symbole de la fête, nous précise Ludivine qui avoue également adorer “les chants de Noël, pas les cantiques religieux mais plutôt des chansons commerciales, celles qui annoncent l’arrivée de la saison, comme le fameux “All I Want for Christmas Is You” de Mariah Carey”.  Si pour elle, Noël est une affaire de famille, pour ceux dont les proches ne célèbrent pas le réveillon, il a fallu se créer d’autres traditions. Ainsi, Gabrielle a pris l’habitude de faire des “Noël entre amis”. “Il y en a qui sont chrétiens et qui ont l’habitude de fêter Noël en famille, mais qui sont loin d’eux. Alors on le fête ensemble depuis deux ans.” Concernant les petits rituels, la jeune femme avoue avoir déjà succombé à des calendriers de l’Avent qu’elle “trouvait stylés”. “Je voyais que tout le monde faisait ça, alors moi aussi j’avais envie d’en avoir, parce que je n’en avais pas quand j’étais petite. Je respectais vraiment le concept de la case par jour !” 

Seda, de confession musulmane, ne fête quant à elle pas du tout Noël, qu’elle estime être “une fête plus commerciale qu’autre chose”. Cependant, elle admet apprécier le calme et l’esprit joyeux de cette soirée : “Mon entourage, mes amis sont en famille, dehors il n’y a personne… Alors même si je ne fais rien, j’aime tout de même ce côté festif, qui permet un peu de nous sortir de la grisaille de l’hiver. J’aime bien avoir un petit sapin par exemple.”

Le Noël de Ludivine, athée

Si Noël n’est pas une soirée exceptionnelle pour elle, elle tient tout de même à profiter de cet élan familial et de générosité pour organiser un grand repas avec ses proches le 31 décembre. “On a l’habitude de faire un beau repas avec mes parents, mon frère et même des membres plus lointains. On se fait des cadeaux, mais ce n’est pas aussi fastueux qu’un vrai Noël. Et évidemment, on se met sur notre 31, sans mauvais jeu de mots !” s’amuse la jeune femme. Pour faire cohabiter ce désir de se retrouver en famille, cet amour des fêtes et ses convictions religieuses, Adlane nous avoue déjà se poser “la question de 2030, quand Noël tombera pendant le ramadan”. Un événement que le père de famille attend avec impatience. “Je pense qu’on fera un ftour spécial pour les enfants, l’idée étant dans notre famille de montrer que nos fêtes sont toutes aussi festives, avec de la déco, une belle table etc. C’est important pour nous qu’ils comprennent que même si on fête Noël, l’Aïd est LA fête que l’on attend vraiment”.

Un alignement des planètes qu’attendent des milliers de Français et qui montre que le véritable esprit des fêtes se situe finalement bien au-delà de la religion mais s’appuie sur le désir de partage de ses traditions, d’instants en famille et de générosité. Même si c’est un peu cliché. 

20 décembre 2024

Previous Article

Ces chanteuses francophones à écouter en 2025

Next Article
"Château-core", "Make-up halo", "Sirène", "Dinette party" ... Zoom sur les tendances Pinterest 2025. Crédit photo : Pinterest

Voici les tendances de 2025 selon Pinterest

Related Posts