En voulant surenchérir sur TikTok, BodyMinute pourrait avoir accélérer sa propre chute et celles de ses franchisés.
L’histoire débute il y a trois ans. En octobre 2022, une TikTokeuse du nom de Laurène Lévy parodie son expérience avec une esthéticienne de chez BodyMinute. Une vidéo humoristique qui, si elle a fait rire les abonnés de la jeune femme, n’a pas du tout plu au patron de la chaîne, Jean-Christophe David, qui a récemment assigné l’influenceuse en justice pour “dénigrement”. Une guerre digitale qui se retourne contre la marque, dont les franchisés se sont récemment unis pour attaquer, à leur tour, BodyMinute.
L’offensive a d’abord été lancé en ligne, discrètement. La marque aurait visiblement ordonné à ses franchisés via une missive interne de créer des comptes TikTok afin de signaler celui de Laurène Lévy… voire de l’harceler. “Défendons nous. Demandez à vos filles d’envoyer des posts pour contredire ses fausses accusations et pour la faire radier de TikTok,” pouvaient notamment lire les esthéticiennes sur leurs boîtes mails. Une tentative d’intimidation qui ne s’arrête pas là. Dans une vidéo postée sur ses réseaux sociaux, Laurène Lévy révèle que BodyMinute a envoyé des huissiers de justice sur son lieu de travail pour “fouiller les ordinateurs, les drives et les mails afin de chercher des preuves qui démontreraient que c’est [son] employeur qui [lui] aurait demandé de dénigrer BodyMinute pour le compte d’un concurrent”. Avant de l’assigner en justice en janvier 2025, et de s’enfoncer dans un bad buzz monumental.
La voie du cyberharcèlement
Car oui : avant de se tourner vers la justice pour régler son litige, BodyMinute a d’abord choisi la voie du cyberharcèlement pour faire taire une Laurène Lévy qui ne cherchait qu’à faire rire. Rancunier, Jean-Christophe David n’a jamais abandonné l’idée de battre l’humoriste sur son propre terrain : les réseaux sociaux. Sauf que, n’est pas influenceur qui veut et tenter de riposter via TikTok nécessite certains codes que le fils de Jean-Louis David ne maîtrise manifestement pas. Sur le compte officiel de BodyMinute, plusieurs vidéos générées par Intelligence Artificielle et utilisant la technologie deepfake ne cessent de s’en prendre à Laurène Lévy, surnommée “Laurène la haine”. Pire encore : un faux-compte du nom de Cruella Reine de TikTok (toujours généré par IA) continue d’alimenter l’affaire dans des vidéos toutes republiées par BodyMinute. Et alors que les journalistes du Parisien questionnent Jean-Christophe David sur la parentalité de ce profil, ce dernier “ne nie pas être à l’origine de ces vidéos”.
Et allez ça continue, Body Minute creuse encore plus. C'est fou de rester bloqué sur ce drama cours de maternelle comme ça. Quelle com désastreuse, ils sont complètement cinglés. #bodyminute pic.twitter.com/dZJ1NDaMc2
— ♫ Emma Gabarda ♫ (@emmagabarda) February 18, 2025
De quoi révolter les internautes, à l’image de l’influenceuse Sarah Chloe Barbier qui s’est insurgée sur ses réseaux sociaux. “À quel moment une enseigne d’épilation petit budget (donc qui s’adresse aux jeunes) peut montrer, avec aussi peu de honte, qu’elle ne comprend pas cette génération ?,” questionne la TikTokeuse. Sur X, une autre utilisatrice soulève le caractère puéril de la communication de BodyMinute, “C’est fou de rester bloqué sur ce drama cours de maternelle comme ça. Quelle com désastreuse, ils sont complètement cinglés.” On assiste alors, en réponse à ce backlash, à la naissance du hashtag #soutienalaurene et à un véritable mouvement de boycott lancé en ligne.
La fin de BodyMinute ?
Visiblement dépassée par les évènements, l’entreprise aurait envoyé un nouveau mail à ses employés, à en croire une enquête signée Les Echos : “Il est demandé aux esthéticiennes de ne pas commenter l’affaire en cours et de rester neutre”. Il leur serait même conseillé de ne pas mentionner le nom de la marque lorsqu’elles publient des offres d’emploi. Car oui : à vouloir jouer les durs sur la toile, on peut tomber sur plus fort que soi. Surtout quand on singe les codes d’une génération sans tenter de les intégrer pleinement. Une leçon qui a eu de réelles répercussions économiques, selon une employée interrogée par les Echos : “J’ai une baisse de chiffre d’affaires d’environ 60 à 70%, confie la franchisée, Aujourd’hui, j’ai eu à peine 5 clientes dans mon institut alors qu’en temps normal, j’en ai une petite dizaine. Les quelques clientes que nous avons gardées sont des clientes d’un certain âge, qui ne sont pas au courant de la polémique.”
De quoi mettre à mal les franchisés qui ont monté une association pour défendre leur droit, et qui n’excluent pas la possibilité d’attaquer en justice le siège pour manque d’assistance. Comme quoi, parfois, lâcher l’affaire, ça a du bon.
25 mars 2025