Une jeune rwandaise condamnée pour avoir porté une robe transparente à un concert de Tayc

Après avoir fait 12 jours de prison, elle a finalement été libérée sous caution.

La photo a été postée sur le média IGIHE / Crédit photo : Darcy Igirubuntu

Le 30 juillet 2022, la jeune Liliane Mugabekazi, 24 ans, assiste au concert du chanteur français Tayc à Kigali, capitale du Rwanda. Dans les tribunes elle est photographiée par le média IGIHE dans une robe noir transparente à strass avec ses amies. La photo postée à l’occasion d’un report photos sur le site de la publication rwandaise devient virale et attire l’oeil des autorités du pays qui arrêtent la spectatrice le 7 août dernier. Lui est reproché d’avoir « assisté au concert avec une tenue qui révélait ses parties privées… une tenue que nous qualifierons d’indigne », ont dit les procureurs, l’accusant de commettre un « crime grave ». « C’est sur cette base que nous avons demandé au tribunal de placer Mme Mugabekazi en détention provisoire pour 30 jours », ont poursuivi les procureurs. Après avoir passé 12 jours en détention provisoire la jeune femme a finalement été libérée sous caution avant l’attente de son jugement qui devrait être prononcé le 23 août prochain.

Face aux juges, Liliane Mugabekazi accompagnée de son avocat a plaidé non coupable stipulant qu’elle n’était pas celle qui avait pris la photo ni l’avait diffusée. Elle a également rappelé qu’elle avait passé la sécurité sans être inquiétée et donc qu’elle n’aurait pas pu accéder au lieu si elle avait été considérée comme nue ou indécente.

Pourquoi une telle sanction ?

« Elle est soupçonnée d’avoir commis une indécence publique », a dit à l’AFP le porte-parole du parquet, Faustin Nkusi. Ce dernier a été soutenu sur la télévision rwandaise par le porte-parole de la police John Bosco Kabera qui a réprimandé ce qu’il a appelé « l’immoralité et l’indécence parmi les jeunes ». Un « problème » qui selon lui « s’aggrave ». « Vous trouvez un individu qui ne porte qu’un chemise seulement… sans pantalon ni short. Ces gens vont ensuite dans les lieux publics habillés comme ça, avec des vêtements qui ressemblent à des filets. », a t-il poursuivi. Questionné sur la liberté de s’habiller à sa guise par l’animateur télé, le porte-parole de la police persiste et signe : « Habillez-vous bien, ne vous habillez pas indécemment », comme le rapporte le média africain New Vision avec l’AFP.

Un raisonnement répété sur le compte Twitter officiel de la police rwandaise qui le 18 août dernier s’est fendue d’un message semblant faire référence à cette affaire. « #RwandaPolice rappelle aux Rwandais que quiconque porte des vêtements nus, agit indécemment en public et donne de l’alcool à un mineur commet un crime. Nous demandons aux parents d’éduquer leurs enfants et de les empêcher de commettre ces crimes ». Au Rwanda l’article 143 du code pénal stipule que toute personne qui commet un acte indécent en public, commet une infraction et s’expose à une peine d’emprisonnement d’au moins 6 mois et d’au plus 2 ans.

Le ministre rwandais de l’administration locale, Jean-Marie Vianney Gatabazi, a lui aussi commenté l’affaire. « Si votre enfant est presque nu et que vous ne faites rien en tant que parent, cela devient un défi. Il faut leur parler et leur enseigner nos valeurs culturelles. Nous avons une culture, que vous avanciez et que vous voyagiez en Amérique, vous avez des valeurs nationales à respecter ».

Et alors que certaines associations sont vent debout pour dénoncer la condamnation de la jeune femme accusée d’attentat à la pudeur, l’ancien ministre de la Justice Johnston Busingye, a soutenu à demi-mot la procédure. « Le problème actuel de nos jeunes hommes et femmes qui boivent et se droguent, en se rendant inconscients, apparaissent nus en public, est répréhensible », a twitté M. Busingye, actuellement ambassadeur du Rwanda au Royaume-Uni. « Je soutiens les efforts (…) pour y remédier », a-t-il ajouté.

Une pétition pour soutenir la jeune femme a été mise en ligne sur la plateforme change.org. Elle a récolté plus de 3 000 signatures.

22 août 2022

Previous Article

Que valent vraiment les marques de mode des influenceuses françaises ?

Next Article

Netflix : 3 nouvelles séries basées sur des faits divers à voir

Related Posts
Lire la suite

Botox, télé-réalité et dérives en France

Deux journalistes françaises ont mené l'enquête et publie le livre "Génération Bistouri". Elles nous racontent ce qui les a le plus choqué durant leurs investigations.
Lire la suite

Sextape, délits et châtiments en ligne

Aya Nakamura est victime d'un chantage à la sextape après un cambriolage durant lequel des vidéos personnelles lui ont été dérobées.